De ses célèbres conférences de méthode à la richesse de sa vie associative, Sciences Po Bordeaux propose un continuum d’enseignements et d’activités qui placent les étudiants au cœur de son action. Cette démarche qui fait la part belle aux interactions permet autant de valoriser le travail de groupe que les aspirations individuelles.
Il faut toujours écouter les visionnaires. En créant en 1872 l’École Libre des Sciences Politiques, Émile Boutmy, son fondateur, proposait un nouveau paradigme de l’enseignement des élites françaises alors meurtries par la défaite face à la Prusse (1870-1871). Son credo : former des esprits libres, ouverts, capables de comprendre le monde et de le transformer. Son mantra : s’appuyer sur une nouvelle façon d’enseigner en s’appuyant sur le dialogue. De cette disruption sont nées les conférences de méthode qui ont marqué du sceau de l’originalité des générations et des générations de diplômés des IEP de France et de Navarre. Des conférences de méthode qui demeurent aujourd’hui plus que jamais d’actualité ! Sur le plan pédagogique, l’exercice développe « la capacité à travailler en groupes et à emprunter une démarche réflexive et cumulative pour répondre de façon méthodologiquement appropriée à une problématique ». En termes de méthode, des équipes d’étudiants planchent sur une thématique définie par l’enseignant à travers un sujet en particulier et présentent leur travail à la classe sous une forme dynamique et interactive : lien avec l’actualité, exposé des faits et des données, argumentation, discussion et mises en perspective… « Cet exercice fait partie de l’ADN de Sciences Po Bordeaux et préfigurait avant l’heure ce que l’on appelle la pédagogie inversée, dont l’objectif est de valoriser les échanges en classe » explique Florie Brangé, ingénieure pédagogique. Florie Brangé œuvre au sein de la Cellule d’Appui à la Pédagogie de l’établissement, constituée désormais de quatre personnes. Un effectif qui montre l’intérêt de l’institut dans l’étude et la mise en œuvre de nouvelles formes d’enseignement qui ont pour la plupart en commun l’ambition de développer l’esprit participatif et collaboratif de la communauté pédagogique de l’école.
Aller au-delà des outils
La crise sanitaire de la Covid-19 a mis en lumière l’importance des outils numériques pour assurer ou enrichir des cours en distanciel. Rappelons à ce titre que la plateforme Moodle de l’Institut propose depuis la rentrée 2009 une interface destinée aux interactions pédagogiques entre la sphère enseignante et étudiante avec une multitude de ressources à la clé. Celle-ci a été considérablement étoffée au fil des ans et fait partie des mœurs éducatifs de l’école. « Notre rôle est bien évidemment de continuer à former collectivement les enseignants à l’outil et à ses nouvelles fonctionnalités. Mais il est aussi de les accompagner de manière individualisée afin d’imaginer avec eux des solutions pour créer et susciter l’interactivité avec ou entre leurs élèves en fonction de leur visée pédagogique et de leur discipline » poursuit Florie Brangé. La responsable de la Cellule d’Appui à la Pédagogie prend ainsi comme exemple des dispositifs pour stimuler et évaluer l’écoute des étudiants, dans un amphi ou une salle de classe, dans une logique de feed-back. La plateforme pédagogique numérique de l’école joue de plus en plus à ce titre un rôle d’extension de la salle de cours. Elle doit donc s’adapter le plus possible aux attentes et pratiques des utilisateurs. Pour cela, dans le cadre de la préparation d’une nouvelle version de Moodle, un panel d’élèves volontaires a été mis à contribution. Ils ont suggéré à travers des focus group des évolutions souhaitables autour de quatre thématiques : l’utilisation de Moodle, le ressenti personnel, les difficultés rencontrées et les perfectionnements imaginés. Ce travail a été piloté par la Cellule d’Appui à la Pédagogie et conduit avec le concours d’une étudiante de l’école qui a été salariée pour cette mission. L’établissement a estimé en effet qu’une élève serait à même de faciliter la remontée d’informations auprès de ses pairs. Cette mise en abîme atteste de la volonté de Sciences Po Bordeaux de mettre son public étudiant au cœur de son projet d’établissement. « L’objectif est effectivement de casser les frontières, de travailler de moins en moins en silo et de multiplier les initiatives participatives » souligne Florie Brangé.
Des interactions tous azimuts
Prendre en compte les aspirations des étudiants, c’est aussi écouter leur désir de personnalisation de la formation. La maquette pédagogique de Sciences Po Bordeaux permet aux élèves de construire pour partie leur parcours scolaire grâce à la multiplication de cours dits « d’ouverture » dès la 3e année. En master, l’offre de spécialités de Sciences Po Bordeaux est connue pour sa densité, avec des cours d’option en prime. Ces dispositifs permettent à des étudiants mus par les mêmes appétences de se retrouver ensemble. Même logique collective dans la mise en œuvre au sein de l’école du dispositif Vocational projects qui permet à des petits groupes d’étudiants de 3e année de mûrir leur choix de master selon une méthode éprouvée d’écoute et d’échange. « Nos étudiants aujourd’hui sont particulièrement sensibles au travail collaboratif. Ils prennent conscience de leur contribution personnelle au sein du collectif. Ce faisant, nous les préparons à passer plus facilement du statut d’étudiant à celui de collaborateur » souligne Nelly Couderc, directrice Développement, Communication et Vie étudiante de Sciences Po Bordeaux. Cette logique se vérifie sur le plan scolaire à travers les projets collectifs tutorés de l’école, présentés dans un dossier d’une newsletter précédente consacré à la professionnalisation. Pour mémoire, ces travaux en groupe d’étudiants sous la conduite d’un (e) enseignant (e) consistent à réaliser de vraies missions en réponse à des commandes d’organisations diverses (ONG, agence de l’ONU, entreprises privées). Cette dynamique s’exprime aussi à travers la riche et stimulante vie associative de l’école plus étoffée que jamais en cette année universitaire 2022-2023. « Si nos élèves se sentent si facilement à l’aise pour créer ou rejoindre une association, c’est aussi grâce à la confiance, au savoir-être et au savoir-faire acquis grâce aux modes d’apprentissage de l’établissement » conclut Nelly Couderc. Des propos qu’Émile Boutmy aurait appréciés !